Donation déguisée : quand faire passer une donation pour une vente peut coûter très cher
- Coralie Daven
- 8 mai
- 3 min de lecture

Dans le cadre de la gestion patrimoniale, certaines stratégies peuvent sembler ingénieuses sur le papier, mais se révéler catastrophiques à l’épreuve du contrôle fiscal. C’est notamment le cas lorsque l’on cherche à déguiser une donation en vente, dans l’espoir de réduire la fiscalité.
Un récent contentieux en fournit une illustration particulièrement parlante. Décryptage.
Une opération à première vue « bien ficelée »
Dans l’affaire en question, une mère décide de vendre la nue-propriété de sa villa à une SCI détenue par son fils. Elle conserve l’usufruit du bien (c’est-à-dire le droit d’en jouir et d’en percevoir les revenus), ce qui permet de transmettre le patrimoine de manière anticipée, tout en gardant l’usage du bien.
Le prix de vente est fixé à 1 190 000 €, censé représenter 70 % de la valeur en pleine propriété (soit une pleine propriété estimée à 1 700 000 €). L’opération semble juridiquement solide.
L'intervention du fisc
Mais l'administration fiscale ne s'est pas laissée convaincre. Une réévaluation de la villa a été opérée, estimant sa pleine propriété à 3 832 950 €. Par conséquent, la nue-propriété transmise valait, selon le fisc, 2 683 065 €, et non 1 190 000 € comme déclaré.
Conséquence immédiate : une présomption de donation déguisée.
Car dans cette configuration, l’administration a considéré que le prix déclaré était nettement inférieur à la valeur réelle et que la vente masquait en réalité une libéralité (un avantage volontaire accordé sans contrepartie).
Des erreurs fiscales aux conséquences redoutables
Plusieurs erreurs ont été commises dans cette opération, aggravant lourdement la situation :
La donation a été faite non pas au fils directement, mais à sa SCI, ce qui a pour effet d’écarter l’application du tarif de donation en ligne directe.
→ Résultat : application du taux de 60 % (tarif applicable entre personnes non parentes) sur la valeur du bien transmis.
La qualification de donation déguisée implique une fraude fiscale, ce qui permet à l’administration de majorer les droits dus de 80 %.
→ Un redressement de 2 800 000 € a été notifié au final. Un coût vertigineux pour une opération censée optimiser les droits de transmission…
Que faut-il retenir de cette affaire de "donation déguisée" ?
Cette affaire rappelle que la frontière entre optimisation et abus de droit est ténue, et que vouloir contourner la fiscalité peut entraîner de lourdes sanctions.
Voici quelques enseignements clés :
Transmettre à une société contrôlée par un proche n’offre pas toujours les avantages escomptés : cela peut neutraliser les abattements et faire appliquer des taux bien plus élevés.
La dissimulation de la valeur réelle d’un bien est à proscrire. L’administration fiscale dispose de moyens d’évaluation pour détecter les incohérences.
Une opération atypique doit toujours être précédée d’une analyse juridique et fiscale rigoureuse, avec l’appui d’un professionnel compétent.
En conclusion
Ce type de montage peut sembler « malin » sur le moment. Mais en pratique, il expose les familles à un risque fiscal considérable, sans garantie de réussite.
La donation déguisée est une fausse bonne idée.
Avant toute transmission patrimoniale, mieux vaut opter pour la transparence et la sécurité juridique, quitte à assumer une fiscalité modérée… plutôt que d’en subir une, majorée de pénalités.
Le bon réflexe ? Se faire accompagner par un notaire ou un avocat fiscaliste.
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